Le Livre de Nat ...

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Plongées dans l'enfer de mon passé


14 février 2015, il est temps de sortir de l'enfer

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14 février. Aujourd’hui, c’est la Saint Valentin. Je m’aime alors que vais-je m’offrir ?

 

Déjà, je viens de me faire un beau cadeau. Je viens d’écrire que je m’aime (et surtout, je le pense, je le ressens).
Sachant d’où je viens, je suis très fière de moi. Quel chemin parcouru ……….

 

La semaine dernière, j’ai vu le film « L’emprise ». Un petit copier-coller du synopsis trouvé sur internet pour savoir de quoi on parle : « L’histoire d’une mère de quatre enfants qui se retrouve en mars 2012 dans le box des accusés des Assises de Douai pour le meurtre de son mari, un homme qui l’a battue et torturée pendant leurs dix-sept ans de mariage... ».

 

J’avoue, ce film m’a bouleversé.

Derrière l’histoire de cette femme, je vois défiler ma vie : l’enfer de la violence familiale.

 

Parents alcooliques, père violent, pour moi, l’enfer était ma norme, ma référence pour apprendre à vivre.

Le passage de la plaidoirie de l’avocat général a énormément résonné en moi. Peut être parce que je n’ai pas eu le droit à cette reconnaissance officielle. Et cela m’a manqué.

 

Dimanche soir, en regardant ma vie passée défilée, j’ai ressenti une émotion très forte, voire violente, insoutenable.
Chaque seconde du film éveillait en moi un souvenir douloureux. Voir l’histoire se dérouler, avec sa chronologie m’a permis d’assembler des pièces de mon puzzle. J’ai vu, j’ai revécu, en condensé, l’insoutenable. J’ai enfin accepté de voir la vérité. Ce que j’ai vécu, ma norme, n’est pas normal. La violence au quotidien, pendant plusieurs années est un enfer où j’ai appris à survivre des mes premiers mois.

 

Il y a l’enfer à l’intérieur du foyer. Et il y a l’enfer à l’extérieur.  Le silence, cette chape de plomb qui emprisonne ce qui se passe à la maison. Ça fait du bruit une femme et des enfants qui crient au secours, en tentant de se protéger des coups de leur … bourreau (que ce mot est difficile à écrire). Et pourtant personne ne voit rien, personne n’entend rien, personne ne dit rien, personne n’intervient.

 

On isole l’enfer pour ne pas ressentir ce profond malaise qui nous met face à notre conscience.

 

A 20 ans, j’ai fui. A 25 ans, la mort de ma mère l’a libéré de cet enfer. A 27 ans, je suis devenue maman. A 30 ans, mon passé m’a sauté à la figure. Ce que j’avais tenté, en vain, de fuir et d’oublier me rattrapait violemment. A 32 ans, j’ai accepté de commencer à essayer de me réparer pour protéger mes enfants de mes vieux démons. Cela fait 12 ans que, patiemment (mais pas toujours dans la douceur et la bienveillance), je retire, couche après couche, les protections, les carapaces, les masques qui m’ont permis de survivre, pour me trouver et savoir qui je suis réellement.

 

Le monde d’où je viens est infernal, insupportable, destructeur, insoutenable, douloureux, injuste, intolérable. Et le chemin que j’ai parcouru à travers cet enfer et celui de ma reconstruction a fait  ce que je suis aujourd’hui.

Le chemin qui me permet de e relever d’un tel traumatisme est long, souvent douloureux, effrayant … mais il en vaut la peine.

 

Au sein du foyer parental, je me suis construite en pensant que je ne méritais pas d’être aimée, ni même d’exister. En tant qu’aînée et déjà douée d’une personnalité « forte » (sans en avoir conscience), j’ai enfilé très jeune, trop jeune, la tenue de pilier de la famille. Je devais protéger ma mère, mon frère.
A l’extérieur du foyer, le silence a fait que j’ai perdu l’espoir et la confiance. A l’extérieur de l’enfer, beaucoup d’adultes font mine de ne pas voir. Certains vous tournent le dos. D’autres vous rejettent comme si vous étiez pestiféré. Comment se construire en ayant confiance en l’être humain ? Heureusement, quelques mains se sont tendues, ponctuellement, suffisamment pour me laisser une petite pointe d’espoir qui fait que je suis encore en vie aujourd’hui. Ces mains m’ont permis de ne pas sombrer, corps et âme.

 

En vivant l’enfer, j’ai appris à me taire, pour survivre, pour ne pas déranger, pour ne pas me mettre en danger …
Aujourd’hui, à 44 ans, je ne veux plus me taire. Je veux parler. Je veux dire. Je veux partager. Je dois me débarrasser de toutes ces émotions que j’ai ressenti et enfouit pour enfin me libérer, pour enfin vivre, pour, de nouveau, espérer. Je dois aller au fond du problème pour me vider, me nettoyer, me trouver, pour enfin vivre et non survivre.

 

En vivant l’enfer, j’ai appris à me débrouiller seule et à ne compter que sur moi (même si je n’en ai pas toujours eu conscience).

Aujourd’hui, je m’aime. J’ai le droit d’exister. Je mérite d’exister, d’aimer et d’être aimée.
Quelle fierté d’être capable d’écrire et, surtout, de ressentir vraiment, ce que je viens d’écrire.
Quel chemin parcouru …..

 

Aujourd’hui, je veux m’offrir cette plongée libératoire. J’ai l’impression de faire une plongée dans la fosse des Mariannes. Je connais le processus. Je vais sauter et me laisser couler pour toucher le fond. Je vais me délester de tout ce poids qui m’empêche de m’envoler. Après, je vais m’aider du fond pour remonter. J’ai peur de manquer d’air et de m’étouffer avant d’atteindre, de nouveau, la surface. Alors, aujourd’hui, je choisis de m’aider en utilisant une bouteille de plongée. 

J’avoue, cette étape me terrifie. Me replonger dans l’enfer de mon passé, revivre, ressentir me tétanise. Cependant, je sais que c’est le bon moment.

Aujourd’hui, j’accepte d’entreprendre cette plongée en étant accompagnée, guidée par des personnes en qui j’ai confiance et qui m’aiment.

Aujourd’hui, je choisis de sécuriser ma plongée pour ne pas risquer de mettre en péril ce que j’ai fait, pour ne pas mettre en péril mon édifice.

 

Voilà le cadeau que je m’offre pour cette Saint Valentin.

 

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14/02/2015
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